/L’enfoirée/

Et parmi toutes ces choses dont tu ne t’es jamais séparée, il y a ce dé à coudre sans âge dans lequel tu récoltes les graines de chaque lueur nouvelle capturée ici et là, par-delà les regards des enfants muets, et ceux des adultes trop bavards, par-delà les nuages, par-delà les éclats tranchants des rires nocturnes qui réchauffent les nuits bleues, par-delà les barrettes oubliées au fond d’une poche, et celles abandonnées sur une table de chevet, par-delà tous les signes que tu observeras, et bien tu découvriras peut-être que la vérité flambe dans le silence qui l’a vue naître. Tu réaliseras aussi peut-être qu’elle a le goût d’une vodka pure sans âge elle aussi. Sers-toi alors de ce dé à coudre pour soupeser ce qui t’appartient. C’est à dire rien. Et c’est plutôt une bonne nouvelle quand tu y penses. Car cela signifie que tu n’as rien à perdre. Plutôt que de te demander ce que tu vas faire de ta vie, demande-toi qui tu es et qui tu veux être. Après tu verras bien. Et si tu ne peux franchir un seuil sans trébucher, et bien relève-toi. Essaie de tomber correctement par contre. Avec fougue et envie je veux dire.
Ne sous-estime pas la sincérité de ceux qui essaient de ne pas devenir des enfoirés, même si parfois ils le deviennent car parfois la vie est une enfoirée elle-même, mais tu sais que ce ne peut être une excuse valable.
Tu n’es pas meilleure qu’une autre, et une autre pas meilleure que toi, sache-le, et si tu l’oublies, tu deviendras la pire des enfoirées.